CLAVECIN PLEYEL

SALON des ARTS-DECORATIFS, PARIS 1925.

Meuble de SUE & MARE – Décor de Bernard NAUDIN – PARIS 1925.

Exposé sur le stand Pleyel du Pont Alexandre III
lors du salon des Arts Décoratifs de 1925

Cet instrument porte le n° de fabrication : 54F969, et le n° de série 184344.
Selon les documents Pleyel de l’époque, il s’agit d’un clavecin Grand Modèle, plaqué poirier, commencé le 4 décembre 1915, sorti d’usine de 3 février 1928 et vendu le lendemain à M. Mac Cormick à Paris.

Prévue dès 1912, l’Exposition des Arts Décoratifs de Paris devait ouvrir ses portes en 1915 mais fut annulée du fait de la Première Guerre Mondiale.
La caisse du clavecin, inachevée, est entreposée dans les ateliers Pleyel jusqu’au nouveau projet d’Exposition de 1925

Le dessin de l’instrument est alors confié aux architectes – décorateurs Louis Süe (1875-1968) et André Mare (1885-1932), tandis que l’ornementation est l’œuvre du peintre et illustrateur Bernard Naudin (1876-1946).

Eu égard au principal répertoire du clavecin et à son image symbolique, les références au style « Grand Siècle » sont visibles tant par les motifs représentés que par les lignes du meubles, notamment le piétement à la « cambrure art-déco » si typique de Süe et Mare.

La Revue Pleyel, dans son n°18 de 1925, présente les pièces exposées au Salon des « Arts-Déco » et conclue ainsi : « Enfin, délicate et précieuse création, voici le clavecin composé par Bernard Naudin avec la collaboration de Süe et Mare, œuvre fort importante dont le charmant archaïsme démontre que le goût moderne sait parfois heureusement se marier avec la grâce et l’esprit des plus exquises œuvres du passé. » G. RÉMON

Il n’empêche que les pianos, plus modernes, lui sont préférés pour figurer dans le grand hall, ce qui déclenche de vives polémiques. La revue l’Art Vivant, dans son N°2 de janvier 1925, quatre mois avant l’ouverture du Salon, publie un article virulent contre cette décision : « A l’Exposition des Arts Décoratifs, on refuse le clavecin décoré par Bernard Naudin ! »…

En fait l’instrument sera présenté « sur le Pont Alexandre, dans une des boutiques édifiées sur les plans de Sauvage et dont l’architecte est M. René-Herbst, l’un des plus osés et des plus sûrs artistes décorateurs de ce temps, » lit-on dans la revue de la marque. « Pleyel expose un groupe imposant de modèles, ensemble hautement significatif et d’une suffisante variété qui nous prouve dans quel esprit ont été poursuivies ses recherches, à la fois fidèles à la tradition et conformes aux plus vétilleuses exigences du goût du jour… et de demain. »

L’instrument porte sur le chapiteau le nom de tous les spécialistes qui ont participé à son élaboration. Après le Salon, il est exposé salle Pleyel puis vendu le 4 février 1928 à l’industriel américain Harold Mc Cormick (1872-1941) pour la somme de $ 6000.00, soit 152 700 FF. (Rappelons qu’un modèle classique de la marque se vend 30 000 FF.)

Mac Cormick finance l’achat de la Société immobilière du Théâtre des Champs-Elysées, sous la direction de son épouse Ganna Walska et du chef d’orchestre Walther Straram. Ce théâtre deviendra un des hauts lieux de la musique contemporaine des années trente.

L’instrument est à la mode. Après Manuel de Falla, (« Concerto pour clavecin et cinq instruments ») Francis Poulenc compose alors son « Concert Champêtre », œuvre pour clavecin, en hommage à Wanda Landowska.

Il s’agit ici du seul clavecin dessiné par des chefs de file de la période Art-Déco, ayant de plus participé au Salon inaugural de 1925.