PIANO GIRAFE PREMIER EMPIRE

Le meuble est construit en acajou de Cuba, plaqué ou massif selon les parties. Une corniche en bois sculpté et doré s’enroule sur une crosse au sommet de l’instrument. Celle-ci prend appui sur une colonne cannelée, surmontée d’un chapiteau corinthien, et reposant sur un stylobate d’acajou. La console est soutenue par deux cariatides à tête de bélier, en bois doré sur fond noir.

Typique de l’époque Empire, le piano-girafe est la forme verticale du piano de concert. Les premiers modèles sont probablement fabriqués à Vienne autour de 1800. Leurs qualités décoratives nettement privilégiées par rapport aux autres instruments de forme plus classique, assurent leur succès dans les salons des capitales européennes. Adaptés par les ébénistes à la mode, au jeu et à l’esthétique de la clientèle, ils sont joués principalement aux Pays-Bas, en Prusse et en France.  Le modèle présenté ici relève de l’esthétique française, entre autre par la présence de deux pédales (forte et una corda) contrairement aux instruments autrichiens qui possédaient généralement entre trois et six jeux.)

Le clavier de six octaves et demie (Do – Sol) aux marches plaquées d’ivoire et aux feintes d’ébène est surmonté d’une façade en palissandre incrustée d’un double filet de laiton.
La table et le mécanisme datent probablement de la seconde moitié du XIXème siècle et proviennent de l’atelier de J.J. Nissen à Amsterdam, dont la signature figure sur le sommier. La conception d’origine des pianos-girafes, réputée pour être peu fonctionnelle, a souvent donné lieu à ce genre de modernisation. Il s’agit ici du système dit « à baïonnettes », inventé par Alphonse Blondel à Paris, facteur de l’Académie Impériale de Musique. L’étiquette d’un revendeur, J.A. Buschen à Amsterdam, est visible à l’intérieur de la caisse.
Des restaurations d’usage sur la dorure et le vernis ont été effectuées, ainsi qu’un remplacement des cordes. L’instrument fonctionne mais nécessite des réglages.

Le lien avec Corneille Charles Emmanuel van der DOES (1769-1827) est permis grâce à un instrument comparable conservé à Londres au Victoria et Albert Museum. Les matériaux, les proportions et les ornements sont de même nature, si ce n’est que le couvercle du clavier est arrondi, que les cariatides sont sculptées de têtes de lion et non de bélier et que les deux pédales d’expression sont « à la française » ; mais l’architecture, le travail et le choix des essences indiquent un atelier commun.

Nous avons répertorié à ce jour trois instruments portant la signature de Cornelius van der DOES: Un piano carré, conservé au Métropolitan Museum of Art de New-York, le modèle cité plus haut, au Victoria et Albert Museum de Londres et un troisième vendu en vente publique à Paris.

Hauteur : 230cm Largeur : 117cm.

Bibliographie :

Pascale Vandervellen : Le piano de style en Europe, des origines à 1850, Mardaga ed. Liège 1994. pp.103-104…
Martha Novak Clinskale : Makers of the Piano 1700-1820, Oxford University Press, New York 1993.
Philip James : Early Keyboard Instruments, P. Davies ed. Londres 1930.
Rosamund Harding : The Piano-forte. Da Capo press, Londres 1933.
Howard Scott : Victoria and Albert Museum, Catalogue of Musical Instruments, Vol 1. p.117.

Photo : Victoria & Albert Museum, Londres